Banderole

La prochaine publication du numéro double de Savoir 143-144-145-146 paraîtra fin Février 2024

29/09/2015

En attendant la Veillée vendéenne du 17 octobre prochain à Saint-Christophe-du-Bois (Maine-et-Loire)

             Trois semaines nous séparent de la journée consacrée à Sophie Boulloys, le 17 octobre, à Saint-Christophe-du-Bois. Héroïne locale de l'épopée vendéenne, Sophie Boulloys ainsi que sa famille n'ont jamais fait l'objet d'une étude approfondie. L'absence de documents empêcherait l'aboutissement d'un tel projet. Sophie est surtout connue pour sa charité. A Saint-Christophe-du-Bois où elle était née on la surnommait « La Mère des Pauvres ». On la connaît aussi pour avoir été l'épouse d'un personnage nanti de quatre prénoms inhabituels commençant tous par la lettre L : Lin-Loup-Lô-Luc Barré.

Un républicain modéré
         Né à Chartres, le 8 août 1773, étudiant en droit puis greffier de justice de paix à Angers en 1793, il s'engagea et devint sergent-major, quartier-maître. Plus tard, il sera nommé, par le représentant Bodin, commissaire des guerres au quartier général de la division des côtes de Cherbourg jusqu’au 12 janvier 1797. De retour à la vie civile, il s'installa en plein pays insurgé et devint commissaire du Directoire près de l'administration cantonale de Jallais... On le disait modéré et il le fut effectivement au moment de l'arrestation du vicaire réfractaire, Mathurin Abaffour. A l'annonce de la reprise d'armes de 1799, il eut peur et se réfugia à Angers. 

Lin-Loup-Lô-Luc Barré
Premier sous-préfet de Beaupréau
     Il joua un rôle très important lors de la pacification de Montfaucon (18 janvier 1800). En récompense de ses bons et loyaux services, il devint, le 22 mai 1800, le premier sous-préfet de Beaupréau (son installation eut lieu le 5 juin suivant), jusqu'au 19 mai 1814, date à laquelle la Première Restauration (5 avril 1814 au 20 mars 1815), le suspendra de ses fonctions. Cependant la Monarchie le gardera à son service puisque, le 3 novembre 1814, elle le nommera secrétaire général d'Eure-et-Loir (son père avait occupé cette fonction dans ce même département en 1797). Le 24 février 1819 il devint sous-préfet de Châteaubriant qu'il abandonnera en 1822.


La peur de la Vendée
      Appelé à siéger au Conseil général de Maine-et-Loire le 7 janvier  1831, mais affolé par les nouveaux troubles de la Vendée en 1832, il donna sa démission en 1833 et se retira à Chartres où il mourut le 16 août 1839. On sait qu'il est l'auteur d'un Essai sur l’industrie, les mœurs, l'administration et les besoins de la Vendée (Paris, Chaignieau jeune, 1815, 107 p.),  bien connu des historiens, cet ouvrage donne parfois des détails d'un grand intérêt.

Bernier au vitriol
      Ainsi ce portrait de l'abbé Bernier qu'il a parfaitement connu : « Sa physionomie ne prévenait point en sa faveur. Il avait la tête grosse, une figure pleine et commune, de petits yeux caves, et, sans être tout-à-fait louche, il dirigeait rarement l'œil en droite ligne vers l'objet visuel; en somme il avait un air faux, un abord éloigné d'inspirer la confiance ». Portrait réaliste de l'éminence grise de Stofflet.
     Même si, au ce sujet de l'influence de Branchu dit Bernier sur le chef de l'armée d'Anjou et du Haut-Poitou, certains pourraient être bientôt obligés d'en rabattre un peu...
      En Anjou, Barré possédait quelques biens - dont une métairie à La Jubaudière - que se partagèrent la femme, les deux frères et les deux sœurs, le neveu et la nièce du défunt.


Témoin et actrice de la contre-révolution
        Sophie Boulloys n'appartenait pas au même monde que Barré. Elle avait vécu la Révolution dans l'autre camp. Son mariage, célébré à Jallais le 12 octobre 1824, dut surprendre quelques personnes. Même si les relations entre gens appartenant à des clans différents se normalisèrent assez vite dans les paroisses.On le sent bien en consultant les actes de mariage.

Sophie Boulloys et la comtesse
Acte de naissance de Sophie Boulloys
           Sophie est un témoin et une actrice de la Révolution et de la contre-Révolution dans l'Ouest. Plus tard, à la comtesse de La Bouëre avec qui elle restera en relation très tard dans le XIXe siècle - la comtesse disparaîtra le 9 septembre 1867 et elle moins d'un an plus tard, le 4 août 1868 - elle racontera qu'elle avait traversé la Loire dans la même barque que le prestigieux général Charles de Bonchamps.
        Agée de 12 ans à l'époque, Sophie se souviendra toute sa vie de ce fait mémorable des guerres de Vendée, et la comtesse n'oubliera pas les récits de celle qui allait devenir la deuxième épouse de Lin-Loup-Lô-Luc Barré. Elle raconte dans ses Mémoires : « Elle me dit que le général vendéen, quoiqu'il fût mourant, chercha à calmer l'inquiétude de ceux qui étaient avec lui, qui redoutaient les coups de fusils et de canons tirés sur eux par les prisonniers républicains qu'on avait mis en liberté avant leur embarquement. Elle se rappelait le bouillonnement de l'eau à chaque boulet qui tombait dans la Loire... »

Léontine d’Aubeterre et madame de Danne
       On sait que Léontine de Lussan-Bouchard d'Aubeterre, abbesse du Ronceray d'Angers de 1762 à 1790, « dame et patronne » de la Trinité, était dans ce même bateau. Quoi de plus normal puisqu'elle était proche parente de l'épouse du général vendéen et que sa signature figure sur leur contrat de mariage.
       Treize de ses religieuses et des domestiques traversèrent également la Loire. L'abbesse mourut du typhus à la prison de la Mission le 8 janvier 1794. Quatre autres religieuses du Ronceray moururent également à la Mission. Il semble que Marie-Jeanne de Bernard de La Roche (1754-1833), était aussi dans ce bateau où Bonchamps agonisait. Elle était veuve, depuis 1789, de son cousin Jacques de Bernard de La Barre de Danne.

En croupe derrière sa sœur
         Pendant une partie de « la tournée de galerne », Sophie Boulloys voyagea en croupe « derrière sa sœur aînée », sans doute Marie-Angélique-Jeanne-Félicité, née en 1772. Au Mans, elles perdirent leur cheval et se trouvèrent séparées l'une de l'autre. L'aînée, arrêtée par les Bleus, fut sauvée - incroyable mais vrai - par.... Westermann qui lui donna un sauf-conduit. Cette dernière mourut peu après.
        Une autre sœur et un frère de Sophie furent condamnés à mort à Nantes. En tout six de ses frères et sœurs disparurent durant cette effroyable campagne d'outre-Loire. Et Sophie ? En sortant de Laval, elle fut abandonnée dans un château. Ne s'y sentant pas en sécurité, elle s'enfuit et s'effondra dans un fossé « où elle tomba sans connaissance ». La croyant morte, on la dépouilla d'une partie de ses vêtements. Conduite à Ancenis, « sa grande jeunesse la sauva de la mort ». Considérée comme « enfant de la patrie », elle fut transférée à Saumur....

Le retour de Sophie Boulloys à Saint-Christophe-du-Bois
       En 1795 et 1796, on retrouve Sophie Boulloys à Châteaubriant comme « réfugiée de la Vendée ». Elle est dite « fille pâtre de Saint-Christophe-du-Bois, 13 ans ». Le 22 juillet 1797, Sophie était de retour à Saint-Christophe où elle assistait comme marraine au baptême de Marie Merlet, la fille du maître d'école.

Maison de Sophie Boulloys à Saint-Christophe-du-Bois
La 206e veillée vendéenne
    Toute cette histoire et sa suite seront racontées par Dominique Lambert de La Douasnerie au cours de la Veillée vendéenne qui aura lieu à Saint-Christophe-du-Bois le 17 octobre prochain (à partir de 16h00 au théâtre).
    Dans une prochaine chronique nous vous parlerons des « batailleurs » et des victimes de Saint-Christophe-du-Bois. Ils seront eux aussi longuement évoqués au cours de cette 206e Veillée vendéenne.

Daniel Lombard



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire