Dans son dernier livre, Les 13 journées qui ont fait la Vendée, Gérard Guicheteau nous parle d’une Vendée qui n’est pas le département, mais la Vendée militaire de 1793. Une entité historique que personne n’attendait. Elle a nourri la réflexion de la plupart des instigateurs de soulèvements révolutionnaires. En Russie, les bolcheviks la citaient toujours en référence. Toute résistance à leur dictature était qualifiée de « Vendée blanche ». En Ukraine, Staline justifiait sa famine programmée en évoquant la terre brûlée ordonnée par la Convention et mise en œuvre par le général Turreau.
On a beaucoup écrit sur la Vendée, probablement trop et mal. Les a priori l’ont trop souvent emporté sur l’étude raisonnée, honnête des sources. Les mémorialistes, les érudits, les historiens de sensibilité « bleue » ont tout fait pour minimiser et même occulter les atrocités sans nom perpétrées au nom des immortels droits de l’homme, de la République une et indivisible. Ceux de racines ou de sensibilité « blanches » les ont mises en pleine lumière avec le risque de les surexposer.
En 1993, deux siècles après le soulèvement, les controverses, à forte connotation politique, étaient toujours aussi vives. Elles sont toujours là. D’un côté, un Raynald Secher qui, après avoir soulevé le lièvre, avec courage, a fini par faire un fonds de commerce de sa Vendée ultra-catholique ; de l’autre Jean-Clément Martin, néo-jacobin, qui poussivement a dû reconnaître l’extermination de masse instruite et exécutée tout en la mettant entre guillemets tout comme il le fait pour la « Terreur ». De son côté, égaré dans ses nuées, le pseudo historien Mélenchon poursuit de sa haine Vendéens et chouans (qu’il confond). Comme Jean-Paul Sartre, il juge parfaitement justifiée une des plus sanglantes répressions de notre histoire.
Et Guicheteau dans tout ça ? Ses lectures, ses références, ses réflexions ? Un gars des Mauges, instruit à l’école de la République. Avec de bonnes lectures, blanches et bleues, Mesdames de La Rochejaquelein, de Bouëre, Gontard de La Chevallerie, les républicains Bénaben, Savary, Kléber… Avec toujours sous le coude le « Chassin », cette collecte formidable de sources. Bref, une familiarité telle qu’elle lui permet de narrer en 13 journées les épisodes les plus cruciaux de la seule véritable guerre de Vendée. De la débandade du général comte de Marcé au pont de Gravereau près de Chantonnay, le 19 mars 1793, au massacre final de Savenay, les 23 et 24 décembre.
Partout, Guicheteau met en évidence le martyre des femmes pour ne pas oublier que la révolution jacobine fut la plus féminicide de toutes.
Notre homme est davantage qu’historien, il est écrivain. Un style qu’il n’a emprunté à personne. Une alacrité de ton inimitable. Des récits même les plus sombres, portés par une écriture sans fioritures qui va droit au but : montrer que le cours de l’histoire va rarement de A à Z, qu’il est parsemé d’aléas qui perturbent et même détournent son flux. La Vendée n’en est peut-être pas la meilleure illustration. Mais, vaincue de la façon la plus ignoble, elle continue à inspirer nos actes.
Jean Heurtin
Gérard Guicheteau, Les 13 journées qui ont fait la Vendée, Cerf, 283 p., 22 euros.
Article communiqué par Henry Renoul, extrait de
- https://www.breizh-info.com/2023/05/05/219516/la-vendee-en-treize-journees/