Mémoire des Guerres de Vendée
à Saint-Christophe-du-Bois
1 - Au Prieuré de La Haye eurent lieu des pourparlers de paix entre Canclaux et Stofflet le 6 avril 1795
« Le trois avril 1795, Canclaux, qui avait envoyé des émissaires à Stofflet, pour lui offrir la paix reçut de ce général une réponse pour lui faire connaître qu'il acceptait l'entrevue qu'on désirait avoir avec lui. « Nous lui avons fait répondre, dit Lofficial, que nous nous rendions le 16 Germinal (5 avril) à la maison de ''la Haye'' près de Mortagne, à midi précis » Mais sur la demande de Stofflet, l'entrevue fut différée au 6 avril. Le 6 avril, « les représentants du peuple nous attendaient. Le Conseil entra dans la maison et notre troupe resta au milieu du camp républicain »...
Le Prieuré de la Haye, en cours de restauration
2 - Dans le cimetière de Saint-Christophe, la tombe de Sophie Boulloys restaurée
SOPHIE BOULLOYS, la mère des pauvres de Saint-Christophe (1781-1868)
Lorsque la municipalité de Saint-Christophe-du-Bois donna au bâtiment abritant l’école de musique le nom de « Sophie Boulloys », peu de Christophoriens connaissait l’existence de cette personnalité, de sa famille, de son rôle dans la paroisse et la commune. André Chauvin, érudit christophorien, avait pu cependant rappeler les grandes lignes de sa vie dans les journaux locaux. On trouve également son histoire et celle de son mari dans le n° 114 de la SLA de Cholet, sous la signature de Louis-Emmanuel Gaillard et d’Edmond Rubion.
Une famille de notables
Sophie Boulloys, née le 28 octobre 1781, était la fille d’un notable de Saint-Christophe, le docteur Charles-Lazare Boulloys, d’une famille de chirurgiens, qui avait épousé Angélique Boissinot, autre famille notable. Ils vivaient dans la propriété qui se situait à l’angle de la rue du Poitou et de la rue Maréchal Leclerc, démolie depuis (photos).
Ce qui est particulièrement intéressant dans la destinée de Sophie Boulloys, c’est qu’elle a participé dans sa jeunesse, sans le vouloir assurément, à une série d’évènements qui a marqué durablement notre commune, mais plus généralement ce qu’on a appelé « la Vendée militaire » qui comprenait en 1793-1794 les bocages Vendéens et Bressuirais, les Mauges, le Pays de Retz et le Pays du Loroux en Loire-Inférieure.
L’épopée vendéenne débutée en mars 1793 par le soulèvement populaire contre les mesures antireligieuses de la Convention républicaine s’est achevée en partie lors de la défaite vendéenne de Cholet, le 17 octobre de la même année, conduisant 80 000 Vendéens à franchir la Loire en une foule désordonnée et désemparée. Sophie Boulloys, alors âgée de 12 ans fit partie de cette cohorte, accompagnée de ses huit frères et sœurs. Les Mémoires de la Comtesse de La Bouère signalent sa présence dans le bateau transportant de Saint-Florent-le-Vieil à Varades le général Bonchamps mourant, celui là même qui venait de grâcier 5000 prisonniers républicains. On suit alors Sophie Boulloys dans le sillage de l’armée catholique et royale, ses frères et sœurs qui meurent des souffrances endurées ou exécuter par les Bleus. Le reste de l’armée vendéenne se fait massacrer à Savenay, le 23 décembre 1793. Désormais sans famille, elle reste à Châteaubriand jusqu’en 1796 où elle bénéficie des secours distribués aux réfugiés de la Vendée. Pendant ce temps, la Vendée Militaire est en effet ravagée par les Colonnes infernales de Turreau qui n’épargnent pas Saint-Christophe. En 1797, Sophie Boulloys revient à Saint-Christophe. Elle s’y retirera à nouveau, après la mort de son mari.
L’apparent paradoxe de la vie de Sophie Boulloys sera son mariage en 1824 – elle a alors 43 ans – avec Lin-Loup-Lô-Luc Barré, négociateur de la paix de Montfaucon, signée le 18 janvier 1800 et premier sous-préfet de Beaupréau, aujourd’hui arrondissement de Cholet.
La liberté religieuse
Lin-Loup-Lô-Luc Barré, né le 8 août 1773, a en effet commencé sa carrière administrative en Maine-et-Loire, dès 1795 après s’être engagé dans l’armée républicaine. En 1797 il est nommé au Directoire départemental du canton de Jallais dont il démissionnera le 12 mai 1799. A la demande du Général républicain Hédouville, Barré reprend du service pour engager les négociations de paix avec l’Abbé Bernier, agent général des Armées catholiques et royales, lesquelles avaient repris les combats après les exécutions de Stofflet et de Charette. Lin-Loup-Lô-Luc Barré est convaincu que la clef de la paix réside dans la liberté religieuse. Il le dit et l’écrit à plusieurs reprises. Pendant de long mois, il circule dans les Mauges, déguisé en Vendéen, il rencontre l’abbé Bernier et autres chefs de l’insurrection vendéenne. Nous sommes alors sous le Consulat de Napoléon Bonaparte qui reconnaissait la grandeur des Vendéens et qui redonna à la France la liberté religieuse par le Concordat de 1802. Le 22 mai 1800, en remerciement, Lin-Loup-Lô-Luc Barré est nommé premier sous-préfet de Beaupréau jusqu’au 19 mai 1814 où il sera destitué à cause de sa fidélité à l’Empereur. Il sera cependant réintégré dans l’administration jusqu’en 1822 et il prendra sa retraite dans les Mauges.
Veuf depuis 1810, il rencontre notre héroïne de Saint-Christophe, Sophie Boulloys qu’il épouse en 1824. Il mourra le 16 août 1839. Sa veuve vivra 29 ans de plus à Saint-Christophe où elle se donnera la mission d’aider les familles en difficultés, notamment celles ayant perdu plusieurs de leurs membres pendant les Guerres de Vendée. Elle sera très active au Bureau de Bienfaisance, l’ancêtre de notre CCAS. Elle fera don de 10 000 francs pour la construction de l’actuelle église paroissiale et assurera une rente de 400 francs de l’époque au Bureau de Bienfaisance pour aider les familles pauvres. On l’appellera alors « la Mère des Pauvres », épitaphe gravée sur sa pierre tombale, dans le cimetière de Saint-Christophe-du-Bois. Sa mémoire méritait largement d’être honorée à Saint-Christophe qui l’a vu naitre et mourir et qui aura profité de sa générosité.
3 - Devant le Logis de Beauregard, aux portes de Mortagne, une plaque à la mémoire d’un prêtre martyr
Saint-Christophe-du-Bois
4 - Le devoir de mémoire pour 300 victimes de la Révolution
La commune de Saint-Christophe accueillait le samedi 17 octobre 2015 les adhérents de l’association « Vendée militaire » auxquels se joignirent de nombreux Christophoriens pour honorer la mémoire de Sophie Boulloys, « la Mère des Pauvres », survivante des Guerres de Vendée, alors que six de ses frères et sœurs et trois cents habitants de la commune y perdaient la vie.
La journée commémorative débutait aux confins de Mortagne-sur-Sèvre, devant la croix de l’abbé Nicolas, massacré par les Bleus et par une halte au Logis de Treize-Vents. Elle s’est poursuivie par l’accueil officiel de Sylvain Sénécaille, maire, aux participants de cette journée. Avec cœur et intelligence, il a su exprimer son souci de l’avenir sans oublier le passé historique de sa commune martyre. Gilles Bourdouleix, député maire de Cholet a tenu lui aussi à honorer la mémoire des combattants vendéens – c’était le 222e anniversaire de la défaite de Cholet aux conséquences historiques considérables – en distinguant bien les volontés partagées de réforme de 1789 d’avec la Terreur totalitaire de 1793-1794, cause du soulèvement « du Vieux Pays ».
Après le repas pris en commun, la centaine de participants s’est rendue au cimetière de Saint-Christophe pour assister au dévoilement de la plaque offerte par la Vendée Militaire, plaque dévoilée par le jeune Alexis Onillon. Henry Renoul, conseiller délégué, devait en quelques mots rappeler la spiritualité de Sophie Boulloys et le pardon offert aux bourreaux, au nom des victimes.
La commémoration s’est achevée par la Veillée vendéenne, animée par le président Dominique Lambert de La Douasnerie, au cours de laquelle furent rappelées avec force les causes religieuses des Guerres de Vendée, leur déroulement marquée par les victoires et les défaites et la répression génocidaire que subit la Vendée Militaire, et en particulier Saint-Christophe-du-Bois marqué par le passage des Colonnes Infernales de Turreau.
Un ouvrage a été édité par l’association « Saint-Christophe-du-Bois pendant la Révolution et les Guerres de Vendée », écrit par Wilfrid Paquiet que l’on peut se procurer au siège de Vendée Militaire, rue de la Gare à Ingrandes-sur-Loire. Cet ouvrage rappelle que Saint-Christophe appartenait au Poitou et donc à la Vendée avant la Révolution, reprend la liste des combattants et des victimes, retrace la carrière des deux peintres Audfray et réédite les réflexions de Lin-Loup-Lô-Luc Barré, premier sous préfet de Beaupréau et époux de Sophie Boulloys sur « L’industrie, les mœurs, l’administration et les besoins de la Vendée (Militaire) ».
Henry Renoul
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