06/09/2015

Les cartes postales anciennes et les guerres de Vendée

      Des cartes postales, datant du tout début du XX° siècle, ont parfois été utilisées pour illustrer des ouvrages ou des revues consacrées aux Guerres de Vendée. Elles sont souvent esthétiquement moins plaisantes que les photos actuelles en couleurs mais les sujets traités sont toujours plus riches, précis et multiples. Pourtant, ces cartes postales, surtout dans la période 1900-1914, dite de « l’âge d’or », peuvent nous apporter beaucoup plus de renseignements qu’une simple illustration concernant la Vendée Militaire. Elles nous informent, en effet sur :
  • L’état réel des édifices vers 1900 (par exemple l’Herbergement-Ydreau)
  • les monuments aujourd’hui disparus (l’église de Belleville)
  • l’identification d’objets (contrecœur de la Duchesse de Berry)
  • les récits encore vivants au XIX° siècle (légendes des cartes postales)
  • l’état des connaissances sur les Guerres de Vendée à cette date (gravures, publications)
  • les souvenirs de cérémonies mémorielles (inauguration de la croix de La Chabotterie, théâtre de Beaupuy)
  • le classement dans le patrimoine historique (Jules Robuchon)
  • le positionnement des éditeurs de cartes par rapport à la cause vendéenne (Amiaud, Poupin, Dugleux, etc.)
Nous allons illustrer aujourd’hui le premier de ces huit points à l’aide d’un exemple, celui du château de l’Herbergement-Ydreau ; nous pourrons exposer les autres ultérieurement.


1°- Les cartes postales anciennes montrent l’état réel des édifices vers 1900 :
On a souvent ironisé sur les motivations des premiers photographes qui, arrivant dans une commune, s’intéressaient tout d’abord à la gare, puis à l’église extérieure et intérieure enfin à quelques rues, laissant de côté tous les autres édifices intéressants. C’est très largement exagéré et toutes les cartes postales que nous vous présenterons ici en seront autant de démentis.

Cette carte postale, portant le N° 270, a été éditée au début de l’année 1901 par Lucien AMIAUD photographe à La Roche sur Yon (installé en cette ville de 1897 à 1903, il partira ensuite aux Sables d’Olonne). Elle représente les ruines du château féodal de l’Herbergement-Ydreau situées dans la commune de l’Oie, à trois kilomètres au sud-ouest du célèbre carrefour dit des Quatre-Chemins. Ce cliché est désormais un document historique en quelque sorte puisqu’aujourd’hui la tour de gauche est à demi rasée et la partie dominant l’arc du portail, avec la fenêtre à meneaux, a disparue.

      Cette enceinte fortifiée aurait été construite au début du XIII° siècle par la famille de Châteaubriant seigneur des Roches Baritaud. Elle faisait suite à une ancienne motte féodale située au même endroit. Les portes et ponts-levis de la forteresse ont été ajoutés ou refaits au tout début du XV° siècle par Georges de la Trémoïlle vicomte de Thouars qui tenait le domaine de sa mère Marie de Sully. Après plusieurs changements de propriétaires, le château passa ensuite par alliance en 1590 à la famille Sapinaud seigneurs de la Brethonnière. Et c’est le propre père du général Sapinaud de la Rairie qui le vendit en 1767 à Daniel François de la Douespe seigneur du Fougerais.

        Cet édifice se trouve être étroitement lié aux Guerres de Vendée. En effet, dès le 14 mars 1793, le lendemain de la prise des Herbiers, et la veille de la première attaque de Chantonnay, les troupes vendéennes y bivouaquèrent pour la première fois. Cet ancien château familial connu, avec son enceinte fortifiée et son emplacement géographique à proximité de la position stratégique des Quatre-Chemins de l’Oie, les incita à y installer durablement leur camp le 16 mars. Après la victoire déterminante de Gravereau, remportée à peu de distance le 19 mars 1793, ils y installèrent le quartier général de l’Armée du Centre et son arsenal. D’ailleurs, c’est à cet endroit qu’un conseil de guerre désigna Charles Aimé ROYRAND de la Roussierre comme général en chef et responsable de la première division de l’Armée du Centre, dite de Montaigu. C’est également d’ici que Louis Célestin SAPINAUD de Boishuguet, dit de la Verrie, partit pour installer son état major à Chantonnay où il trouvera la mort lors d’une embuscade à Pont Charrault le 25 juillet 1793. Et c’est toujours du château de l’Herbergement que l’Armée du Centre se regroupa avec l’artillerie de Rostaing pour attaquer le bataillon du Loiret qui défendait la partie nord du camp des Roches situé à proximité (à Saint-Germain de Princay). Après la déroute, à ce dernier endroit des armées de la Convention, le 5 septembre 1793, l’Herbergement-Ydreau devint plus que jamais le camp officiel de l’Armée du Centre. 
 
      Toutefois, les fluctuations des combats firent que le château fut ensuite plus ou moins utilisé jusqu’au passage de la Loire le 18 octobre 1793. Après la fin tragique de la Virée de Galerne à la bataille de Savenay le 23 décembre 1793, Sapineau de la Rairie, revenu d’Outre-Loire, réorganisa bien une petite Armée du Centre ; mais il ne semble pas qu’il soit revenu au château de l’Herbergement-Ydreau. Finalement, le 16 juillet 1794 la colonne infernale du général Tuncq vient s’en emparer, le pilla et l’incendia totalement. 
 
        Les vestiges de son passage vont être pratiquement laissés à l’abandon dans l’état pendant tout le XIX° siècle. C’est donc précisément cette image de désolation que nous restitue la carte postale de Lucien Amiaud ci-dessus.


Chantonnay le 5.IX.2015
Maurice BEDON

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