27/08/2017

Au château, pas la vie de roi

Olivier et Anne du Boucheron ont repris le château de la Baronnière il y a huit ans. Ils travaillent sans relâche pour remettre en état ce domaine ayant appartenu au général vendéen Bonchamps.

C’est l’histoire d’une passion intense. D’un attachement irrépressible nourri par un passé séculaire. Quasiment d’une mission. « Pour nous, c’est un très beau projet. Redonner au lieu le lustre d’autrefois. Ça fait partie de l’histoire du pays. Il y a une forme de devoir. » Anne et Olivier du Boucheron ont tout plaqué il y a huit ans pour reprendre possession du domaine familial de la Baronnière, à La Chapelle-Saint-Florent. « Nous étions alors installés en Belgique, explique Anne. Ça a bouleversé nos vies. » Ce changement, le couple l’a voulu et organisé. Leur défi était immense : restaurer un parc d’une trentaine d’hectares et un riche patrimoine bâti composé d’un château XIXe, d’une chapelle et d’une cour carrée entourée de dépendances. « Nous avons fait ce choix-là, nous ne nous plaignions pas. Mais nous avons tellement donné. »
Pas « 20 000 larbins à notre service »
Depuis huit ans, ils sont constamment occupés et n’ont pas besoin de chercher beaucoup pour trouver de quoi faire. « C’est un chantier perpétuel », indique Olivier du Boucheron. Sa femme opine. « On bosse comme des malades, nous sommes toujours habillés en sale, au turbin tout le temps. » Entre la tonte des pelouses, l’entretien des espaces boisés et le travail dans le somptueux jardin, domaine réservé d’Anne, les extérieurs nécessitent un lourd investissement. Tracteurs et pelle mécanique ne restent jamais très longtemps à l’arrêt. Mais, forcément, les bâtiments méritent encore plus d’attention.

« Le château a été échafaudé pendant quatre ans », note la propriétaire. Toitures, électricité, façades ont été soignées. Une bonne partie des chambres ont été refaites. La cour carrée et ses dépendances, vestiges du XVIIIe siècle, ont aussi subi un vrai lifting. « Nous avons enlevé tous les arbres, refait le pavé pour lui donner une allure très sobre. » L’étage a été en partie réaménagé pour abriter la famille en hiver.

Ces travaux colossaux ont été financés par le couple, avec des aides partielles de l’Etat, le château néogothique étant classé Monument historique depuis 1995. « Tout notre argent passe ici, c’est un choix. » Sans se lamenter, les de Boucheron balaient les préjugés dont sont parfois victimes les châtelains, loin de l’image de seigneurs féodaux qu’on leur accole encore. « C’est fini tout ça. Certains croient qu’on a 20 000 larbins à notre service. Le public ne se rend pas toujours compte de ce que ça représente. » Seul un salarié vient les soutenir quatre jours par semaine. « La piscine, on y passe deux fois par an, on n’a jamais le temps ! »

L’investissement de ces parents est quasi sacerdotal. Ce qui ne les empêche pas d’ouvrir leurs portes aux groupes de visiteurs quand ils le peuvent. « On apprécie vraiment de le faire, on aime transmettre. Mais c’est aussi le lieu où nous vivons donc on ne peut pas ouvrir tout le temps. »

Tant que l’énergie est là, les choses fonctionnent plutôt bien. Mais la question de la succession se posera inéluctablement. Leurs enfants seront-ils prêts à autant de sacrifices ? « On s’interroge tous les jours. Ce n’est pas un hasard s’il y a des châteaux à vendre partout »

Un site animé et toujours vivant


Si le couple du Boucheron habite sur place, il n’est pas le seul à fréquenter la Baronnière. Le parc et ses bâtiments attirent d’abord régulièrement la famille et les amis. 

« Nous acceptons aussi les visites de groupes, détaille Anne du Boucheron. Nous aimons cela mais nous n’avons pas les moyens d’avoir un gardien pour ouvrir tout le temps. » 

Des randonneurs sont parfois de passage sur le domaine, qui ouvre tous les deux ans pour les Journées du patrimoine. « Il peut y avoir 3 500 personnes à l’année. » Le Grand défi de la biodiversité est passé par la Baronnière il y a quelques années, tout comme des camps de scouts réguliers. 
La demeure peut également être louée pour des réunions de famille 

Les deux vies du château de la Baronnière


Le domaine a appartenu à une famille locale dont le représentant le plus connu est le général Bonchamps, avant de tomber dans le giron d’armateurs nantais.
Dans les Mauges, les Guerres de Vendée ne sont jamais loin. À La Baronnière, leur empreinte est particulièrement palpable. Le château d’Ancien régime a été incendié en avril 1793 par les Républicains. « Des sourciers disent ressentir ce passé quand ils viennent ici », indique Anne du Boucheron. Le propriétaire de l’époque était une figure de l’armée vendéenne, le général Charles-Artus de Bonchamps, connu pour avoir gracié des milliers de prisonniers « bleus ».
Une famille d’armateurs
Sa famille a hérité du domaine par succession, à la suite des Froyer. Du château de l’époque, il ne reste presque rien. Seule la structure d’une ancienne tour sert aujourd’hui de base à la chapelle datant de 1842. Les du Boucheron se sont d’ailleurs mariés en ces lieux. La cour carrée située à l’entrée actuelle de la Baronnière date du XVIIIe. Elle a été remise en état ces dernières années.

Le château actuel, de style néogothique, a vu le jour au XIXe siècle. Il a été bâti entre 1854 et 1858 selon les plans de l’architecte angevin René Hodé, à la demande de la deuxième grande famille propriétaire, les Arnous-Rivière, dont descend aujourd’hui Anne du Boucheron. « C’était une grande famille d’armateurs nantais, explique Olivier du Boucheron. Ils ont racheté la Baronnière en 1801 car la veuve de Bonchamps n’en voulait plus. Ils s’en sont servis pour recevoir et n’y étaient qu’un mois par an. » Au début du XXe siècle, les deux guerres mondiales passant, le site a été abandonné pour revivre petit à petit à partir de 1975, à l’initiative de la mère d’Anne du Boucheron, venue s’installer sur place.

Courrier de l'Ouest du 27 août 2017 

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